L’attentat suicide de masse contre l’ambassade iranienne à Beyrouth témoigne des capacités opérationnelles accrues des Brigades Abdullah Azzam, branche d’Al-Qaïda au Liban et du transfert du la confrontation sunnite-chiite de la Syrie au Liban

Zone de l'explosion (Chaîne al-Alam, Iran, 21 novembre 2013).

Zone de l'explosion (Chaîne al-Alam, Iran, 21 novembre 2013).

L'ambassade d'Iran au Liban après l'explosion (www.m3n4.com)

L'ambassade d'Iran au Liban après l'explosion (www.m3n4.com)

La voiture piégée noire photographiée par une caméra de sécurité sur place quelques secondes avant l'explosion (Al-Alam, Iran, 23 novembre 2013)

La voiture piégée noire photographiée par une caméra de sécurité sur place quelques secondes avant l'explosion (Al-Alam, Iran, 23 novembre 2013)

Débris de la moto près de l'ambassade d'Iran à Beyrouth  (Al-Safir, Liban, 25 novembre 2013)

Débris de la moto près de l'ambassade d'Iran à Beyrouth (Al-Safir, Liban, 25 novembre 2013)

Le terroriste suicide Muin Abu Zaher (Site Internet Bint Jbeil, 23 novembre 2013)

Le terroriste suicide Muin Abu Zaher (Site Internet Bint Jbeil, 23 novembre 2013)


Aperçu général

1.   Le 19 novembre 2013, un attentat suicide de masse impliquant deux terroristes suicide a été commis à l'entrée de l'ambassade d'Iran au Liban, dans la banlieue Sud (chiite) de Beyrouth. Selon nous, l'objectif de l'opération était de démolir le bâtiment et de porter atteinte à un maximum d'employés de l'ambassade. L'attentat a fait 23 morts et 146 blessés. Parmi les victimes figurait Ibrahim Ansari, l'attaché culturel iranien. Après l'attaque, les funérailles de dix membres du Hezbollah tués dans l'explosion ont été organisées, certains d'entre eux appartenant au personnel de sécurité de l'ambassade.

2.     Les Brigades Abdullah Azzam, une organisation terroriste affiliée à Al-Qaïda et au jihad mondial, ont revendiqué la responsabilité de l'attaque. Les Brigades Abdullah Azzam opèrent au Liban et dans d'autres régions du Moyen-Orient. L'organisation, dont le bastion libanais est situé dans le camp de réfugiés d'Eyn al-Hilweh au Sud-Liban, a revendiqué la responsabilité de tirs de roquettes en Galilée occidentale  (22 octobre 2013), visant à provoquer le Hezbollah.[1]

3.   L'attaque a été réalisée alors que le régime syrien et ses partisans (Iran, Hezbollah) s'apprêtent à lancer une campagne de purification de la région des Monts Qalamoun, une chaîne de montagnes stratégiques au Nord-Est de Damas. L'attaque contre l'ambassade iranienne à Beyrouth a été perçue au Liban comme une tentative de détourner la pression de la Syrie, de l'Iran et du Hezbollah sur les bastions rebelles en Syrie en envoyant le message que les réseaux affiliés au jihad mondial et à Al-Qaïda pourraient frapper la Syrie et ses partisans dans la cour arrière libanaise. 

4.   L'attaque de l'ambassade représente le "succès" le plus visibledans la série d'attaques menées ces derniers mois par des organisations sunnites extrémistes, dont les Brigades Abdullah Azzam, attaques commises dans le but de provoquer l'Iran et le Hezbollah. Selon nous, l'attaque a porté un coup important à la sécurité et à l'image du Hezbollah et de l'Iran. Le recours à des terroristes suicide conduisant des véhicules et des motos piégés est un modus operandi caractéristique du Front Al-Nusra, une branche d'Al-Qaïda en Syrie,[2] qui, selon nous, a été transféré au Liban et s'est retourné contre le Hezbollah et l'Iran. La méthode a été utilisée au Liban par le Hezbollah dès 1983 (les attentats suicide commis par le Hezbollah avec le soutien iranien contre l'ambassade américaine et les bases militaires américaines et françaises dans l'Ouest de Beyrouth). Ainsi, trente ans plus tard, la "boucle est bouclée", alors que le Hezbollah, qui a, avec le soutien iranien, initié de telles attaques et les a utilisées pour en tirer un capital politique, est devenu l'objectif.

5.   Selon nous, le "glissement" du conflit sunnite-chiite de la Syrie au Liban et l'intensité croissante de la violence entre les deux rivaux sont susceptibles de porter atteinte plus encore à l'autorité et à la capacité de gouverner de la fragile administration libanaise et d'augmenter la déstabilisation croissante de la scène libanaise. Les forces de sécurité libanaises n'ont pas les capacités politiques opérationnelles et internes de résister aux luttes violentes des organisations terroristes qualifiées soutenues par une partie de la population libanaise et par des puissances extérieures, qu'elles appartiennent au jihad mondial (dont les partisans trouvent refuge dans les camps de réfugiés palestiniens) ou au Hezbollah (basé au sein de la population chiite au Liban et soutenu par l'Iran et la Syrie).

6.   En conclusion: Le double attentat suicide contre l'ambassade d'Iran, et les attaques qui l'ont précédé, témoignent, selon nous, de l'augmentation des capacités opérationnelles des Brigades Abdullah Azzam et des réseaux sunnites salafistes et jihadistes opérant dans l'arène libanaise. Ces capacités sont maintenant tournées contre l'Iran et le Hezbollah, et pourraient également se retourner contre Israël (comme cela a été manifesté par les tirs de roquettes en Galilée occidentale). L'Iran et le Hezbollah, qui ont subi un sérieux revers à leur sécurité et à leur image, pourraient prendre des mesures contre les Brigades Abdullah Azzam au niveau sécuritaire (protection de personnalités et des installations) et au niveau offensif (représailles contre des personnalités et des organes affiliés à Al-Qaïda et aux réseaux extrémistes sunnites). Tout ceci pourrait conduire à une aggravation du conflit sunnite-chiite au Liban, voire au-delà des frontières libanaises, alors même que la guerre civile continue de faire rage en Syrie.

Description (préliminaire) de l'attentat

7.   Le 19 novembre 2013, un double attentat suicide a été commis à l'entrée de l'ambassade d'Iran à Beyrouth. L'ambassade est située dans le quartier de Bir Hassan à la périphérie de la banlieue chiite du Sud de Beyrouth, bastion du Hezbollah au Liban. Selon les médias libanais et ceux du Hezbollah, l'attaque a débuté par l'explosion d'un terroriste suicide à moto près de la barrière située devant l'ambassade.[3] Quelques minutes plus tard, une Chevrolet Blazer noire (4X4) conduite par un second terroriste suicide est arrivée, chargée d'une grande quantité d'explosifs (entre 50 et 100 kg). Des témoins oculaires interviewés par la chaîne de télévision affiliée au Hezbollah Al-Mayadeen ont affirmé que le premier terroriste suicide ne s'était pas fait exploser, mais avait été abattu par les gardes de sécurité de l'ambassade.

8.Selon le journal libanais Al-Safir, la voiture utilisée dans l'attaque a été achetée dans le village de Britel dans la vallée de la Bekaa au Liban. Les explosifs y ont été déposés dans la région de Yabrud, dans les montagnes de Qalamoun. La voiture a ensuite été conduite en Syrie via le village sunnite d'Arsal, au Nord de la vallée de la Bekaa. Selon des "sources de sécurité" libanaises, l'attaque a été planifiée et orchestrée en Syrie (Al-Safir, Liban, 25 novembre 2013). Selon le quotidien libanais affilié au Hezbollah Al-Akhbar, le chef du Hezbollah Hassan Nasrallah a déclaré que l'attaque avait été soigneusement planifiée et que ses planificateurs étaient très familiers de l'ambassade d'Iran. Son objectif était de détruire la partie de l'immeuble près de l'entrée où se trouvait le bureau de l'ambassadeur iranien, qui était la cible de l'attaque (Al-Akhbar, 25 novembre 2013). Selon les médias libanais, l'enquête a montré que cette attaque et les précédentes dans la banlieue Sud de Beyrouth ont été planifiées par des membres d'Al-Qaïda en Syrie, dans le cadre de la tentative de transférer la confrontation avec le Hezbollah en territoire libanais (Al-Akhbar, 20 novembre 2013).

Victimes de l'attaque

9.   Selon les médias libanais, 23 personnes ont été tuées dans l'attaque, dont Ibrahim al-Ansari, l'attaché culturel iranien, et 146 autres ont été blessées. Les médias libanais ont également déclaré qu'al-Ansari avait été tué dans son véhicule alors qu'il attendait Ghadanfar Rokon Abadi, l'ambassadeur iranien au Liban (Al-Joumhouria et Al-Nahar, 20 novembre 2013). Les médias du Hezbollah ont annoncé les funérailles de dix membres de l'organisation, dont une partie étaient selon nous les gardes de sécurité de l'ambassade (voir ci-après).

Photos du site de l'attaque (Gauche : Al-Arabiya ; droite : chaîne Al-Alam, Iran)
Photos du site de l'attaque (Gauche : Al-Arabiya ; droite : chaîne Al-Alam, Iran)

Identité des terroristes suicide

10.   Les médias libanais ont publié des photos et des informations sur les terroristes suicide : tous deux vivaient dans la région de Sidon et étaient partisans du cheikh salafiste sunnite anti-Hezbollah Ahmed Asir. Il a également été rapporté qu'une branche des Brigades Abdullah Azzam, qui collabore avec Ahmed Asir, est active dans le camp de réfugiés d'Eyn al-Hilweh près de Saïda (Al-Nahar, 23 octobre 2013).

11.   Ci-après les premières informations sur les deux terroristes suicide :

A. Muin Adnan Abu Zaher, de Sidon, partisan du cheikh salafiste sunnite anti-Hezbollah Ahmed al-Asir (Al-Nahar, Liban, 22 et 23 novembre 2013). Trois jours avant l'attaque, il a écrit sur ​​sa page Facebook qu'il s'apprêtait à venger Ahmed al-Asir. Selon la chaîne de télévision Al-Arabiya, il a vécu dans le passé au Danemark d'où il s'est rendu au Koweït pour travailler, avant de se rendre en Syrie et au Liban (Al-Arabiya, 23 novembre 2013). Le 31 octobre 2013, il a contacté un ami sur Facebook et a écrit qu'il comptait atteindre le paradis avant lui (Site Alkhabarpress, 22 novembre, 2013). Selon un article de Saad Hariri, le principal dirigeant sunnite au Liban, le terroriste suicide (qui n'est pas mentionné par son nom) était un jeune sunnite de Saïda dont la mère était chiite, qui a combattu avec "un groupe armé" en Syrie qui l'a envoyé se faire exploser au Liban (Al-Mustaqbal, 24 novembre 2013). Selon Al-Nahar (25 novembre 2013), il est entré au Liban de Syrie par le terminal d'Al-Masnah avec des papiers d'identité libanais.

B. Adnan Musa al-Muhammad, d'origine palestinienne,[4] dont la famille réside dans le village de Bissarye', au Sud de Sidon. Mécanicien de profession, il aurait souffert de problèmes psychologiques (Télévision Al-Jadeed, 24 novembre 2013). Cette année, il vivait à Al-A'aqabia. Il avait été arrêté par les renseignements militaires libanais. Il avait coupé les liens avec sa famille au cours de la dernière année (Site Internet Jibshit, 23 novembre 2013). Sa mère a condamné l'attaque, affirmant que "la religion de Mahomet ne dit pas de commettre des attentats suicide". Elle a dit qu'il ne savait pas son fils priait à la mosquée Bilal bin Rabah à Eyn al -Hilweh [la mosquée du cheikh Ahmed al-Asir] ni qu'il appartenait au réseau d'al-Asir (Site Internet Bint Jbeil, 23 novembre 2013).

Droite : Le terroriste suicide Adnan Musa al-Muhammad (Site Internet Bint Jbeil, 23 novembre 2013). Gauche : Adnan Musa al-Muhammad en uniforme militaire (Site Internet Bint Jbeil, 24 novembre 2013)
Droite : Le terroriste suicide Adnan Musa al-Muhammad (Site Internet Bint Jbeil, 23 novembre 2013). Gauche : Adnan Musa al-Muhammad en uniforme militaire (Site Internet Bint Jbeil, 24 novembre 2013)

Victimes du Hezbollah dans l'attaque

12. Après l'attaque, des funérailles ont été organisées au Sud de Beyrouth pour les dix activistes du Hezbollah qui auraient été tués. Selon nous, au moins certains d'entre eux appartenaient au personnel de sécurité de l'ambassade d'Iran. Un d'entre eux, Radwan Muhammad Fares, était en charge de la sécurité de l'ambassade (Voir photo). Un autre, Ahmed Zaraqat, était l'un des gardes de l'ambassade. Les funérailles des activistes du Hezbollah ont lieu les 20 et 22 novembre 2013 en présence d'une foule nombreuse. L'ambassadeur d'Iran au Liban a participé à des funérailles le 20 novembre 2013 (Al-Ahed, 20-22 novembre ; site Internet Bint Jbeil, 20 novembre 2013).[5]

Revendication de responsabilité

13. Le cheikh libanais sunnite Siraj al-Din Zariqat, affilié aux Brigades Abdullah Azzam, a annoncé sur son compte Twitter le 19 novembre 2013 que les Brigades Abdullah Azzam étaient responsables de l'attaque de l'ambassade d'Iran à Beyrouth. Il a déclaré que deux autres "chahids" sunnites [les deux terroristes suicide] avaient été tués. Il a ajouté que les attaques continueront au Liban jusqu'à ce que deux demandes soient satisfaites : le retrait du Hezbollah ("le camp iranien") de Syrie, et la libération des prisonniers des Brigades Abdullah Azzam détenus dans les prisons libanaises. Cheikh Siraj al-Din Zariqat avait annoncé le 22 août 2013 que les Brigades Abdullah Azzam étaient responsables du tir de quatre roquettes sur Haïfa et d'autres "secteurs stratégiques" en Israël. Al-Akhbar, un journal libanais affilié au Hezbollah, a rapporté que le cheikh Zariqat se trouve en Syrie depuis plus d'un an et ses communiqués ont été publiés à partir de là (Al-Akhbar, 20 novembre 2013).

Réactions de l'Iran et du Hezbollah

14. La réaction immédiate de l'Iran à l'attaque a été de blâmer Israël. L'ambassadeur iranien, interrogé par la chaîne de télévision affiliée au Hezbollah Al-Mayadeen (19 novembre 2013) a déclaré que "l'entité sioniste et ses agents sont derrière l'attaque terroriste". A une autre occasion, il a déclaré que "tout le monde sait que l'ennemi sioniste soutient les groupes terroristes en Syrie, en Irak et récemment, au Liban" (Agence de presse Fars, citant un entretien avec l'ambassadeur d'Iran à la chaîne Al-Nashra, 24 novembre 2013).

15. Par la suite, le Hezbollah a rejoint l'ambassadeur iranien en accusant Israël, mais des responsables de l'organisation ont également montré du doigt Al-Qaïda, décrite comme un outil aux mains des Israéliens. Interviewé par une chaîne de radio libanaise, cheikh Naim Qassam, le secrétaire général adjoint du Hezbollah, a déclaré que "ce sont les mains criminelles des takfirs [cf., Al-Qaïda[6]] et d'Israël qui bénéficient de l'instabilité libanaise [cf., qui sont responsables de l'attentat]" (Site Inn.co.il, 21 novembre 2013). Lors d'une cérémonie organisée dans la localité libanaise de Jibshit, Muhammad Raed, chef de la faction du Hezbollah au parlement libanais, a déclaré que l'attaque de Beyrouth était "un message israélien envoyé par le biais des [groupes] takfirs". Il a ajouté que son objectif n'était pas seulement de détruire le bâtiment de l'ambassade, mais aussi de déstabiliser le Liban et de porter atteinte à son unité nationale (Al-Nasra, Liban, 23 novembre 2013). Nabil Qauq, vice-président du comité exécutif du Hezbollah, a déclaré que l'attaque montrait "la gravité de la menace terroriste takfir israélienne sur le Liban" (Agence de presse libanaise, 24 novembre 2013).

16. "Des sources [anonymes] de haut rang du Hezbollah" ont fait référence à l'importance de l'attaque et aux réactions possibles. Les sources, interrogées par le quotidien libanais Al-Joumhouria (20 novembre 2013), ont déclaré "nous sommes entrés dans une nouvelle phase dangereuse, la phase des terroristes suicide". Elles ont ajouté qu'elles allaient "prendre des mesures extraordinaires" parce qu'en ce qui les concerne, "tout a changé". Elles se sont dit préoccupéespar des attentats suicide supplémentaires visant des installations ou des concentrations de population chiite, "comme ce qui se passe en Irak". Elles ont également déclaré que le Hezbollah a réalisé un grand effort sécuritaire pour empêcher les voitures piégées de pénétrer [dans les centres de population chiite], mais "il est difficile de faire face à des attentats suicide". Le 20 novembre 2013, Al-Joumhouria a indiqué que la direction du Hezbollah avait organisé des consultations sécuritaires à haut niveau où il avait été recommandé que des "mesures exceptionnelles" soient prises pour protéger les bureaux, les domiciles et les sièges de l'organisation contre des attentats suicide.

Menaces envers l'Arabie saoudite

17. Deux jours après l'attaque, l'ambassade d'Arabie Saoudite au Liban a appelé ses ressortissants à quitter le Liban et à prendre des précautions de sécurité (AP, 21 novembre 2013). L'appel a fait suite à des publications sans fondement dans les médias libanais et les réseaux sociaux accusant l'Arabie saoudite d'être impliquée dans l'attaque. Une photographie aérienne de l'ambassade d'Arabie saoudite montrait ainsi l'inscription "Ambassade d'Arabie saoudite au Liban, non-sérieux s'abstenir" (Al-Quds Al-Arabi, 21 novembre 2013).

18. Un éditorial au ton particulièrement menaçantintitulé "Présent du royaume [saoudien] à l'Iran" a été publié parIbrahim al-Amin, rédacteur en chef du quotidien libanais affilié au Hezbollah, Al-Akhbar. Il y a accusé l'Arabie saoudite d'être responsable de l'attaque terroriste au Liban (Al-Akhbar, 20 novembre 2013). Selon l'auteur de l'éditorial, "nul n'avait prévu que le royaume de l'oppression [cf., l'Arabie saoudite] se précipiterait à déplacer la bataille à une nouvelle étape, y compris en tentant d'imiter les attentats suicide irakiens au Liban". Il a également déclaré que les combats en Syrie ne seraient pas influencés par des attentats suicide au Liban, et a laissé entendre que la campagne pourrait être étendue à d'autres pays du camp saoudien, comme le Yémen et Bahreïn. Il a ajouté que le Hezbollah, avec les services de sécurité libanais, avait empêché de nombreuses attaques terroristes en Liban mais que le début d'une série d'attentats suicide le forcerait à "prendre des mesures de dissuasion préemptives". En conclusion, l'éditorial affirmait que le "front mondial de destruction de l'Orient arabe" [cf. L'Arabie saoudite et ses alliés] a décidé de lancer une campagne sanguinaire contre l'Iran et qu'il fallait s'attendre à des "vagues supplémentaires de folie sous la forme de cadeaux royaux rouges". Cependant, "l'Iran a ses propres méthodes et ses propres capacités de dissuasion, et pourra faire face à des attaques".

Précédents attentats contre le Hezbollah et les foyers chiites

19. L'attaque de l'ambassade d'Iran était un pic dans la vague d'attaques variées perpétrées au Liban ces derniers mois visant le Hezbollah et les centres de population chiite. Selon nous, certaines ont été réalisées par des réseaux salafistes sunnites au Liban, et d'autres par les Brigades Abdullah Azzam et d'autres organisations affiliées au jihad mondial. Jusqu'à présent, le Hezbollah n'a pas réussi à enrayer les attaques qui illustrent la façon dont la guerre civile syrienne a des retombées au Liban, et comment la confrontation chiite-sunnite est entrée dans l'arène libanaise. L'attaque contre l'ambassade d'Iran pourrait témoigner d'une détérioration de la confrontation dans l'arène libanaise voire ailleurs.

20. Deux attaques à la voiture piégée ont été commises dans la banlieue Sud de Beyrouth, bastion du Hezbollah :

  A. Le 9 juillet 2013, une voiture piégée a explosé dans un parking du quartier de Bir al-Abd dans la banlieue Sud de Beyrouth, tuant plusieurs personnes et faisant plusieurs centaines de blessés. Aucune organisation n'a revendiqué la responsabilité de l'attaque.

B. Le 15 août 2013, une voiture piégée a explosé dans la banlieue Sud de Beyrouth entre les quartiers de Bir al-Abed et d'Al-Rawis, tuant 25 personnes et faisant des centaines de blessés. Aucune organisation n'a revendiqué la responsabilité de l'attaque.

21. Au Liban en général et dans les rangs du Hezbollah en particulier, la crainte existe que la vague d'attentats lancés par des organisations affiliées à Al-Qaïda continue. Les médias libanais ont rapporté que le 22 novembre 2013, l'armée libanaise a identifié une voiture piégée au Nord de la vallée de la Bekaa, contrôlée par le Hezbollah. Selon la presse, le véhicule a été identifié par des soldats de l'armée libanaise (selon un autre compte-rendu, par le Hezbollah) alors qu'il faisait route de Syrie au Liban (dans la région d'Arsal). Quand les soldats se sont lancés à la poursuite de la voiture, ses passagers ont ouvert le feu. Après un échange de tirs, le véhicule a été saisi et entre 400 et 500 kilogrammes de TNT et deux obus de mortier ont été découverts. L'armée libanaise a fermé la zone, a évacué les résidents, a neutralisés les explosifs et a ouvert une enquête. Les passagers du véhicule ont réussi à s'échapper (Sites Alhayat.com et Al-Joumhouria,  25 novembre ; site Lebanon Files, 23 novembre 2013).

[1]A ce sujet, voir notre article du 28 août 2013 intitulé :  "Les Brigades Abdullah Azzam, proches du jihad mondial, ont revendiqué la responsabilité du tir de roquettes du Sud Liban sur la Galilée occidentale le 22 août", à l'adresse http://www.terrorism-info.org.il/fr/article/20563

[2]A ce sujet, voir notre article du 17 septembre 2013 intitulé : "Le Front al-Nusra ("Jabhat Al-Nusra") est un réseau jihadiste salafiste d'Al-Qaïda qui occupe une place centrale au sein des groupes rebelles en Syrie", à l'adresse http://www.terrorism-info.org.il/fr/article/20573

[3]Selon une autre version, le terroriste suicide était à pied, mais des photos des lieux corroborent la version selon laquelle il s'agissait d'un motard.

[4]Le 24 novembre 2013, l'Autorité Palestinienne (AP) a condamné l'attaque contre l'ambassade d'Iran, déclarant que la participation d'un Palestinien "à cet acte criminel" était un acte individuel qui sert uniquement les intérêts des ennemis de la cause palestinienne. L'AP a exprimé ses condoléances aux familles des victimes et a déclaré qu'elle se tenait aux côtés du Liban (Agence de presse Wafa, 24 novembre 2013).

[5]En plus de dix activistes de l'attentat à Beyrouth, le Hezbollah a également récemment eu des pertes en Syrie. Le 20 novembre 2013, le site Lebanon 24, citant des "sources libanaises" a rapporté qu'environ dix membres du Hezbollah avaient été tués dans la région de Damas au cours des derniers jours, et que l'organisation les avait enterrés dans leurs lieux de résidence dans la vallée de la Bekaa et au Sud du Liban.

[6]Le Hezbollah appelle les groupes affiliés à Al-Qaïda "groupes takfirs", à savoir, les groupes qui déclarent un musulman ou un groupe "infidèle" parce qu'il n'adopte pas l'Islam radical (ce qui leur donne une légitimité à attaquer l'individu ou le groupe).