L’utilisation de terroristes suicide : principal modus operandi du Front Al-Nusra et de l’Etat islamique contre le régime syrien et le Hezbollah au Liban*.

Le terroriste suicide Abu Usama al-Australi (alias Abu Usama al-Muhajir) prononce ses dernières volontés debout sur le toit du camion utilisé dans l'attentat suicide.

Le terroriste suicide Abu Usama al-Australi (alias Abu Usama al-Muhajir) prononce ses dernières volontés debout sur le toit du camion utilisé dans l'attentat suicide.

L'attentat suicide contre des infrastructures du Hezbollah à Beyrouth revendiqué par l'Etat islamique (2 janvier 2014)

L'attentat suicide contre des infrastructures du Hezbollah à Beyrouth revendiqué par l'Etat islamique (2 janvier 2014)

L'attentat suicide contre des infrastructures du Hezbollah à Beyrouth revendiqué par l'Etat islamique (2 janvier 2014)

L'attentat suicide contre des infrastructures du Hezbollah à Beyrouth revendiqué par l'Etat islamique (2 janvier 2014)

La station de gaz dans Hermel à  proximité du site de l'attentat suicide (Aleqt.com)

La station de gaz dans Hermel à proximité du site de l'attentat suicide (Aleqt.com)

Sacs de sable protégeant l'entrée d'un magasin dans la banlieue Sud de Beyrouth

Sacs de sable protégeant l'entrée d'un magasin dans la banlieue Sud de Beyrouth


Utilisation de terroristes suicide en Syrie et au Liban[1]

1.   Le recours à des terroristes suicide contre le régime syrien et le Hezbollah au Liban est un modus operandi utilisé par Al-Qaïda en Irak et dans d'autres arènes de confrontation islamique. Au cours de la guerre civile syrienne, les attentats suicide sont devenus la marque du Front Al-Nusra et de l'Etat islamique en Irak et dans la Grande Syrie (ci-après : "'État islamique"), deux organisations affiliées à Al-Qaïda et au jihad mondial. Les attentats suicide ont été nombreux en 2012 et 2013 et ont infligé de lourdes pertes au régime syrien en termes de victimes et de dégâts. Ils ont également eu un effet néfaste sur les symboles de sa souveraineté et ont élevé le statut des organisations responsables. Depuis 2014, les attaques ont été exportées au Liban et sont devenues le principal modus operandi de la lutte contre le Hezbollah et les chiites.

2.   Le Front Al-Nusra, la branche d'Al-Qaïda en Syrie, est l'organisation rebelle responsable du plus grand nombre d'attaques suicide en Syrie au cours de la guerre civile. Entre sa création en Janvier 2012 et fin Décembre 2012, l'organisation a revendiqué la responsabilité de 43 des 50 attaques suicide commises contre le régime Assad (LongwarJournal.org). En 2013, le Front Al-Nusra a effectué 34 attentats suicide. Neuf autres ont été menés par l'Etat islamique, la branche syrienne d'Al-Qaïda en Irak, qui a commencé à opérer en Syrie fin Mai 2013. En 2013, les deux organisations ont commis un total de 43 attentats suicide (équivalent au nombre d'attaques commises par le Front Al-Nusra en 2012). Cinquante-trois terroristes suicide ont participé aux attaques. Ces attentats suicide représentent environ 15 % de toutes les attaques suicide menées dans le monde en 2013.[2] Les attentats suicide ont depuis été exportés au Liban, avec cinq attentats commis depuis début 2014, quatre par le Front Al-Nusra et un par l'Etat islamique.

3.   Les attaques en Syrie ont été menées par des terroristes suicide équipés de ceintures  piégées qui se sont faits exploser près de cibles associées au régime syrien. Dans certains cas, ils ont fait exploser des voitures ou des camions chargés de grandes quantités d'explosifs afin de causer plus de victimes et de dégâts. Certaines des attaques étaient combinées et impliquaient deux voire trois véhicules piégés qui ont explosé simultanément ou à la suite. Selon nous, une partie des attentats se distinguent par un niveau de sophistication et de professionnalisme élevé: six attentats suicide ont été menés simultanément dans deux lieux à proximité. Certaines des attaques contre des cibles de "qualité" ont été menées par plusieurs terroristes suicide. La plupart étaient des volontaires étrangers, principalement issus du monde arabo-musulman (en particulier d'Arabie saoudite).

4.   Les organisations affiliées à Al-Qaïda et au jihad mondial opérant en Syrie ont gagné en expérience dans l'orchestration d'attaques suicide. Selon nous, cette expérience représente une menace dont les implications dépassent l'arène syrienne. La preuve actuelle de cette menace est que les attentats suicide sont exportés au Liban, où ils sont utilisés pour attaquer le Hezbollah et portent atteinte à la fragile stabilité interne du Liban. Plus la guerre civile syrienne continue, plus les chances que les attaques suicide originaires de Syrie s'infiltrent dans d'autres pays augmentent. Les volontaires jihadistes étrangers qui retournent dans leur pays d'origine après la Syrie sont susceptibles d'initier ou de participer à des attentats suicide, en utilisant l'expérience opérationnelle acquise et les contacts avec des membres d'Al-Qaïda et du jihad mondial. En outre, selon nous, les organisations affiliées à Al-Qaïda et au jihad mondial opérant en Syrie sont susceptibles de lancer des attentats suicide dans des pays occidentaux, contre l'Etat d'Israël et les pays arabo-musulmans (bien que leur priorité soit toujours de renverser le régime d'Assad).

Remarques méthodologiques

5.   Cette étude analyse 43 attaques suicide commises en Syrie en 2013, dont 34 par le Front Al-Nusra et neuf par l'Etat islamique. Elle est principalement basée sur les revendications de responsabilité publiées par les organisations. Selon nous, celles-ci correspondent approximativement au nombre d'attaques suicide effectivement réalisées. En outre, des attentats suicide ont été déjoués ou ont mal tourné et nous ne possédons pas d'informations à leur sujet. Nous n'avons pas inclus les attaques menées par d'autres organisations rebelles islamistes et jihadistes, qui ne représentent qu'une petite fraction. De plus, l'étude analyse les cinq attentats  suicide commis au Liban par le Front Al-Nusra et l'État islamique de début Janvier 2014 à Février 2014.

6.   Les attaques en Syrie passées en revue dans cette étude comprennent également six attentats combinés effectués simultanément par deux terroriste suicide à deux endroits d'une même zone. Chacun d'eux est compté comme deux attaques. Cependant, une attaque combinée de plusieurs terroristes suicide menée contre une seule cible est considérée comme une seule attaque.

7.   Nos principales sources d'information sont les sites Internet des organisations du jihad, en particulier les revendications de responsabilité et les vidéos publiées par le Front Al-Nusra et l'État islamique. Elles ont été recoupées avec des informations provenant des médias arabes et occidentaux sur la guerre civile en Syrie et les événements au Liban.

Conclusions de l'étude des attentats suicide en Syrie en 2013

8.  Ci-après les principales conclusions de l'étude des attentats suicide commis en Syrie en 2013 :

1) Les objectifs des attentats suicide : La plupart des attaques ont visé des installations, des bases et des individus associés aux forces de sécurité et à l'administration syriennes. Parmi celles-ci figuraient des attaques contre des barrages routiers, des sièges, des bases militaires et des camps de l'armée syrienne et des services de sécurité du régime. Des établissements affiliés au gouvernement ont également été attaqués (postes de police, prisons, usines de munitions), de même que les résidences des agents des forces de sécurité syriennes. Bien que les attaques visaient des objectifs du gouvernement et de la sécurité, elles ont souvent causé des dommages collatéraux sous la forme de pertes civiles lourdes. À l'occasion, des cibles civiles où se trouvaient des membres des forces de sécurité ont également été attaquées. Les dommages causés aux civils créent un problème pour l'image des organisations, en particulier le Front Al-Nusra, qui fait un effort pour obtenir le soutien de la population syrienne (l'Etat islamique est moins préoccupé par son image).

2) Modus operandi : La plupart des attaques ont été menées par un seul terroriste suicide qui a fait exploser une ceinture d'explosifs ou une voiture piégée. Dans certains cas, l'attaque étaitl'effort combiné de trois, quatre ou même cinq terroristes suicide, soit à un endroit ou simultanément à plusieurs emplacements adjacents. Les attaques complexes ont été réalisées par le Front Al-Nusra, dont les capacités opérationnelles sont supérieures à celles de l'État islamique.

3) Cibles : Il existe deux types principaux d'attentats suicide : l'attaque suicide préparatoire, commise comme la première étape avant l'attaque principale sur une cible choisie, comme une position, un barrage, un camp ou toute autre installation associée au régime syrien ; et l'attaque létale visant à provoquer un grand nombre de victimes sans prendre le contrôle de la cible.

4) Lieux : environ un tiers des attaques ont été commises dans la région de Damas et ses environs (la "ghouta"). Selon nous, l'intention était de porter un coup douloureux au régime afin d'exposer sa vulnérabilité et de gagner la plus grande couverture médiatique possible. Environ les deux tiers ont été effectuées dans les différentes zones de combat du Front Al-Nusra et de l'Etat islamique au Nord et à l'Est de la Syrie : Alep, Hasakah, Idlib, Hama, Homs et Deir ez-Zor. Un attentat suicide a été commis sur le plateau du Golan et un autre dans la région de Deraa. Selon nous, le nombre peu élevé d'attaques suicide commises sur le plateau du Golan et dans la région de Deraa pourrait témoigner de la faiblesse relative des organisations affiliées à Al-Qaïda et au jihad mondial dans ces régions, du moins jusqu'à présent (bien que les attaques commises étaient complexes et douloureuses pour le régime).

5) Fréquence : Le Front Al-Nusra et l'État islamique ont réussi à assurer une fréquence régulière d'attentats suicide durant l'année 2013 (en moyenne deux par mois). Aux mois de Janvier, Juin, Août et Septembre, quatre ou cinq attaques ont été commises chaque mois. En Février 2013, dix attentats suicide ont été recensés. Selon nous, le maintien de la succession continue des attentats suicide, y compris les attaques sophistiquées, témoigne des capacités opérationnelles élevées des organisations et d'un grand réservoir d'agents très motivés prêts à se sacrifier pour le jihad en Syrie.

6)Collaboration avec d'autres organisations : La plupart des attaques ont été commises par le Front Al-Nusra ou l'Etat islamique et n'ont pas été coordonnées avec d'autres organisations rebelles. Certaines ont été réalisées en collaboration avec d'autres organisations rebelles, presque toutes de nature jihadiste. Dans un seul cas, le Front Al-Nusra et l'État islamique ont collaboré à la réalisation d'un attentat suicide.

7) Les testaments des terroristes suicide : Dans certains cas, des vidéos ont été publiées montrant les terroristes suicide lisant leurs dernières volontés. L'analyse de ses testaments témoigne de l'importance du désir du Front Al-Nusra et de l'Etat islamique de placer l'accent sur la nature sectaire de la lutte entre sunnites et alaouites. L'accent a également été mis sur la poursuite du jihad contre les "infidèles" comme devoir personnel (fard ayn) de chaque musulman (selon l'école d'Abdullah Azzam, le mentor idéologique d'Oussama ben Laden). Les testaments sont diffusés dans le monde arabo-musulman et en Occident par des sites Internet jihadistes et leurs thèmes et messages sont propagés dans les pays d'origine des volontaires étrangers à leur retour de Syrie.

Le rôle des volontaires étrangers dans les attentats suicide

9. Cinquante-trois terroristes suicide ont participé aux attentats suicide commis par le Front Al-Nusra et l'Etat islamique. La plupart d'entre eux ont été réalisés par un seul individu, tandis que dans certains cas, trois, quatre ou même cinq terroristes suicide ont été impliqués.

10. Sur les 53 terroristes suicide, nous avons identifié les noms de 30, dont23 volontaires étrangers et sept Syriens. Les identités des autres terroristes nous sont inconnues. L'identification de leur pays d'origine est principalement basée sur ​​leurs surnoms, qui habituellement, mais pas toujours, indiquent leur provenance. Nous avons comparé ces surnoms avec d'autres informations qui dans la plupart des cas ont permis de vérifier leur pays d'origine.

11. Sur les 23 combattants étrangers, 13 étaient d'Arabie saoudite (plus de la moitié). Onzeont été identifiés comme portant des surnoms certainement saoudiens et deux autres avaient des surnoms les reliant à l'Arabie saoudite.Quatre ont été identifiés comme des Jordaniens, trois d'Irak (dont deux Kurdes identifiés par leurs surnoms), un de Tunisie (identifié par son surnom), un d'Australie (identifié par son surnom) et un terroriste étranger dont le pays d'origine n'a pas pu être identifié. Un terroriste canadien a apparemment effectué un attentat suicide, mais son identité et les circonstances de sa mort n'ont pas pu être validées.

12. Le nombre relativement élevé de volontaires étrangers ayant commis des attentats suicide découle principalement du nombre de combattants étrangers dans les rangs du Front Al-Nusra et de l'État islamique. Selon nous, il peut aussi indiquer leur haut niveau de motivation jihadiste, exploité par les deux organisations. Ils sont motivés par l'idéologie du jihad qui les conduit vers la Syrie, où leurmotivation est favorisée par un endoctrinement religieux qui augmente leur ferveur idéologique et prépare un nombre élevé de terroristes suicide potentiels. Cependant, on peut supposer que certains des combattants étrangers qui ont eu la possibilité de commettre un attentat suicide ont refusé, bien que les organisations ne publient pas ces informations (par exemple, nous savons qu'un Arabe israélien qui a rejoint les rangs des rebelles s'est vu proposer de mener une attaque mais a refusé. Selon nous, il n'est pas le seul dans ce cas).

Nombre élevé de terroristes suicide d'origine saoudienne

13. Plus de la moitié des terroristes suicide que nous avons identifiés sont originaires d'Arabie saoudite (13 sur 23). En outre, il existe un grand nombre de combattants étrangers en provenance d'Arabie saoudite dans les rangs du Front Al-Nusra et de l'Etat islamique (ce qui explique pourquoi autant de Saoudiens ont été tués en Syrie). Ainsi, il n'est pas surprenant qu'il y ait autant de Saoudiens parmi les terroristes suicide. L'Arabie saoudite, le principal supporter étranger de la révolte contre le régime Assad, est considérée comme une "serre" dans laquelle les graines d'Al-Qaïda et du jihad mondial ont été semées, malgré les efforts du régime saoudien de s'en soustraire à la responsabilité (la plupart des terroristes qui ont participé aux attaques du 11 septembre 2001 étaient d'origine saoudienne).

14. D'autre part, il y a une véritable critique en Arabie saoudite des jeunes Saoudiens qui rejoignent les rangs des organisations affiliées à Al-Qaïda et au jihad mondial, bien que la critique n'a pas encore été traduite en étapes assez efficaces pour les empêcher de se joindre. Un article publié dans le quotidien saoudien Al-Watan le 27 janvier 2014 a répliqué aux accusations des médias arabes contre les prédicateurs saoudiens qui encouragent les jeunes Saoudiens à se rendre en Syrie pour combattre :

" Il ne fait aucun doute qu'il y a des dignitaires religieux et des prédicateurs, bien connus de l'Etat et des membres des différentes écoles de l'Islam, qui enseignent à nos jeunes hommes, selon la loi religieuse, d'aller en Syrie et les incitent même à s'équiper d'explosifs et à sacrifier leur vie en vain… Malheureusement, nos jeunes alimentent la guerre menée en Syrie. Ils s'y sont rendus pour accomplir un devoir religieux, mais ils n'ont pas les connaissances, l'expérience et la conscience politique. Leurs émotions ont été exploitées par des dignitaires religieux innocents, qui ne savaient pas que les jeunes hommes ne serviraient qu'à des parties intéressées et seraient même utilisés par des services de renseignement régionaux et mondiaux… "

Le Hezbollah dans le collimateur : exportation des attentats suicide de Syrie au Liban
Aperçu général

15. Depuis début 2014, le Front Al-Nusra et l'État islamique ont revendiqué la responsabilité des attaques suicide commises au Liban en utilisant des méthodes familières de l'arène syrienne (terroristes suicide et véhicules piégés). Entre le 2 janvier et le 4 février 2014, cinq attentats suicide ont été commis au Liban : le Front Al-Nusra a revendiqué la responsabilité de quatre et l'État islamique d'un. Ils ont été commis dans la banlieue chiite du Sud de Beyrouth et dans la ville chiite de Hermel, au Nord de la vallée de la Bekaa. La plupart des attaques ont été menées par un seul terroriste suicide qui a fait exploser une voiture piégée.

Description des attentats suicide

16. Le 2 janvier 2014, une voiture piégée a explosé dans la banlieue Sud de Beyrouth. L'attaque visait le Hezbollah et a été réalisée à proximité de certaines de ses institutions les plus importantes. L'État islamique a revendiqué la responsabilité de l'attaque (par le biais de son compte Twitter, qui a été fermé depuis). Quatre personnes ont été tuées et plus de 66 blessées. Les médias arabes ont rapporté que le terroriste suicide était Qutayba Muhammad al-Satem, étudiant de 20 ans du village de Wadi Khaled, à la frontière syro-libanaise. Il a également été signalé que, dans le passé, il avait participé aux combats en Syrie dans les rangs du Front Al-Nusra (Al-Quds Al-Arabi, 4 janvier 2014).

L'attentat suicide contre des infrastructures du Hezbollah à Beyrouth revendiqué par l'Etat islamique (2 janvier 2014)

L'attentat suicide contre des infrastructures du Hezbollah à Beyrouth revendiqué par l'Etat islamique (2 janvier 2014)

Extrait de la revendication de responsabilité de l'État islamique de l'attentat suicide du 2 janvier 2014.
Extrait de la revendication de responsabilité de l'État islamique de l'attentat suicide du 2 janvier 2014. Le texte note que l'organisation a attaqué "le parti de Satan [cf., le Hezbollah]" sur le pas de sa porte dans la banlieue Sud de Beyrouth. Il qualifie l'attaque de "premier paiement d'une longue facture qui attend les infidèles criminels" (Daawla.tumbir.com)

17. Le 17 janvier 2014, un attentat suicide a été commis dans le village chiite de Hermel au Nord de la vallée de la Bekaa. Les médias libanais ont rapporté qu'un terroriste suicide équipé d'une ceinture piégé s'est fait exploser dans une voiture piégée. Quatre  personnes ont été tuées dans l'attaque et 38 autres blessées. Selon les médias libanais, l'explosion s'est produite près des bureaux du gouvernement à Hermel dans une zone commerciale bondée (Selon l'Agence France Presse, le 16 janvier 2014, une explosion a retenti près d'un bastion du Hezbollah à Hermel). Le Front Al-Nusra a revendiqué la responsabilité de l'attaque, disant avoir ciblé un bastion du "parti de l'Iran" [cf., le Hezbollah]. L'attaque aurait été effectuée par l'un des "lions du Front Al-Nusra au Liban" en réponse aux "crimes du Hezbollah au Liban contre les femmes et les enfants sunnites" (Jihadology, 16 janvier 2014).

Le Front Al-Nusra revendique l'attaque à Hermel au Liban (dawaalhaq.com)
Le Front Al-Nusra revendique l'attaque à Hermel au Liban (dawaalhaq.com)

18. Le 21 janvier 2014, un attentat suicide a été commis dans le quartier chiite de Haret Hreik, dans la banlieue Sud de Beyrouth. Le Front Al-Nusra en a revendiqué la responsabilité sur son compte Twitter. Il dit que l'attaque était une réponse aux massacres commis par "le parti de l'Iran" [cf., le Hezbollah] contre les enfants de Syrie et les enfants d'Arsal [3] (un village sunnite au Nord de la vallée de la Bekaa, bastion des adversaires du Hezbollah). Les médias libanais ont rapporté qu'un terroriste suicide s'est fait exploser à l'intérieur d'une voiture piégée. Selon Al-Hayat (22 janvier 2014) la voiture contenait trois obus de mortier de 120mm reliés à 20 kilos d'explosifs. Les médias libanais ont rapporté que l'explosion a tué cinq personnes et en a blessé 74.

19.Le 1er février 2014, un attentat suicide a été commis près d'une station de gaz sur la rue principale du village chiite de Hermel au Nord de la vallée de la Bekaa. Un terroriste suicide au volant d'une voiture piégée a effectué l'attaque. Selon les médias libanais, cinq personnes ont été tuées et 20 autres blessées. Le Front Al-Nusra a revendiqué la responsabilité sur son compte Twitter, affirmant que l'attaque avait été menée dans "le repaire du parti de l'Iran" [cf., un bastion du Hezbollah] en raison des crimes continus [du Hezbollah] contre le peuple syrien.

20. Le 3 février 2014, un terroriste suicide s'est fait exploser sur une route dans le quartier druze de Choueifat près de la banlieue chiite du Sud de Beyrouth. Deux personnes ont été tuées et plusieurs autres ont été blessées. Selon les médias libanais, le terroriste suicide portait une ceinture d'explosifs de cinq kilos et se trouvait dans un minibus se rendant dans la banlieue Sud de Beyrouth. Selon des "sources de sécurité" libanaises, il s'est fait exploser par accident, tandis que d'autres sources ont affirmé qu'il s'est fait exploser après que le conducteur de bus ou des passagers l'ont trouvé suspect (Al-Joumhouria, 4 février 2014).

21. En plus des cinq attentats commis au Liban par le Front Al-Nusra et l'État islamique, un attentat suicide combiné a provoqué plusieurs victimes à l'entrée de l'ambassade iranienne à Beyrouth le 19 novembre 2013. La responsabilité a été revendiquée par lesBrigades Abdullah Azzam, une organisation terroriste affiliée au jihad mondial opérant au Liban.[4] Deux terroristes suicide se sont faits exploser l'un après l'autre dans une attaque rappelant le modus operandi des attaques suicide menées en Syrie par le Front Al-Nusra en 2013 et indiquant que les capacités opérationnelles ont pu être exportées de la Syrie au Liban.

Réaction du Hezbollah

22. Le Hezbollah a accusé les organisations affiliées à Al-Qaïda et au jihad mondial opérant en Syrie ("les organisations takfires") des attentats suicide commis au Liban. Selon le responsable du Hezbollah Hassan Nasrallah, ces organisations introduisent des voitures piégées au Liban par les monts Al-Qalamoun via la ville d'Arsal au Nord de la vallée de la Bekaa. Dans un discours, il a affirmé que la menace à la sécurité était la principale justification de l'augmentation de l'implication du Hezbollah dans la guerre civile syrienne.[5] Sur le terrain, le Hezbollah a institué unesérie de mesures de sécurité, notamment en empilant des sacs de sable devant les magasins comme protection, en particulier dans la banlieue Sud de Beyrouth. Toutefois, jusqu'à présent, ces mesures ne semblent pas être une réponse efficace aux menaces terroristes d'Al-Qaïda et du jihad mondial, qui se tiennent au seuil du territoire du Hezbollah.

Conclusion
23. Selon nous, l'objectif principal de la vague d'attentats suicide commis au Liban est de perturber la participation militaire du Hezbollah dans les combats en Syrie en l'obligeant à s'occuper de l'arène libanaise. L'exportation des attentats suicide de Syrie au Liban pourrait indiquer que le Front Al-Nusra, l'État islamique et d'autres organisations du jihad mondial ont amélioré leurs capacités opérationnelles au Liban et constituent un défi de taille pour le Hezbollah, qui n'a pas encore trouvé le moyen d'y répondre. En outre, les capacités terroristes d'Al-Qaïda et du jihad mondial actuellement exprimées en Syrie et au Liban, pourraient s'exporter dans l'avenir vers d'autres pays arabes, dans l'arène palestinienne, voire en Israël et dans les pays occidentaux.[6]

 

* A ce sujet, voir notre article du 23 septembre 2013 intitulé "Le Front al-Nusra ("Jabhat Al-Nusra") est un réseau jihadiste salafiste d'Al-Qaïda qui occupe une place centrale au sein des groupes rebelles en Syrie", à l'adresse http://www.terrorism-info.org.il/fr/article/20573
[1] L'article dans sa totalité est disponible en anglais à l'adresse http://www.terrorism-info.org.il/en/article/20618
[2] Voir l'article de Yotam Rosner, Einav Yogev et Yoram Schweitzer intitulé "Rapport sur les attentats suicide en 2013", INSS, 14 janvier 2014. Selon le rapport, en 2013, 291 attentats suicide ont été commis dans 18 pays et ont coûté la vie à près de 3 100 personnes. Environ 50% des attaques (148) ont été réalisées au Moyen-Orient, 98 d'entre elles en Irak. Les statistiques indiquent que la Syrie est devenue la deuxième arène d'attaques suicide, après l'Irak.
[3] Le 18 janvier 2013, cinq frères et sœurs ont été tués par une roquette à Arsal. Le Hezbollah a été accusé, mais les accusations n'ont pas été vérifiées.
[4] A ce sujet, voir notre article du 27 novembre 2013 intitulé "L'attentat suicide de masse contre l'ambassade iranienne à Beyrouth témoigne des capacités opérationnelles accrues des Brigades Abdullah Azzam, branche d'Al-Qaïda au Liban et du transfert du la confrontation sunnite-chiite de la Syrie au Liban", à l'adresse http://www.terrorism-info.org.il/fr/article/20598
[5] A ce sujet, voir notre article du 25 décembre 2013 (en anglais), intitulé "In late 2013, Hezbollah again intensified its military involvement in the Syrian civil war, suffering heavy losses", à l'adressehttp://www.terrorism-info.org.il/en/article/20605
[6] Un témoignage actualisé de l'intention de créer un lien opérationnel entre un réseau du jihad mondial en Israël et des agents en Syrie a été révélé par le démantèlement d'un réseau de trois membres affiliés au jihad mondial fin Décembre 2013. Deux d'entre eux étaient des résidents de Jérusalem-Est qui recevaient leurs ordres de la bande de Gaza, principalement par le biais d'Internet. Le réseau prévoyait, notamment, de commettre un double attentat suicide contre le Centre international de conférences de Jérusalem et l'ambassade américaine à Tel-Aviv. L'un des agents était censé se rendre en Syrie via la Turquie pour y recevoir une formation militaire et coordonné l'attaque prévue (Site Internet des services de sécurité générale et Haaretz, 23 janvier 2014).