Pleins feux sur le jihad mondial (8-15 mai 2019)

Principaux événements

• Cette semaine, l’événement principal dans l’arène syrienne a été une offensive terrestre de l’armée syrienne dans la région d’Idlib, contrôlée par les organisations rebelles jihadistes. L’objectif de cette mesure est apparemment de prendre le contrôle des zones situées au Sud-Ouest de la région d’Idlib (à l’Est de la plaine d’Al-Ghab) et au Nord-Ouest (dans la région de Jisr al-Shughur). Jusqu’à présent, l’armée syrienne, avec l’appui aérien russe, a pris le contrôle d’un certain nombre de villes et de villages au Nord-Ouest de Hama (où se déroule l’attaque principale selon nous).
• Parallèlement aux combats, des tentatives ont été faites sur la scène diplomatique pour empêcher la poursuite de l’attaque et les torts causés aux civils (compte tenu de la crainte qu’une vague de réfugiés ne submerge la Turquie et l’Europe). Les démarches diplomatiques incluaient une session du Conseil de sécurité de l’ONU, des discussions entre la Turquie et la Russie et une déclaration commune de la Grande-Bretagne, de l’Allemagne et de la France. Les pays européens ont exprimé leur préoccupation devant les pertes massives de civils causées par les attaques aveugles du régime syrien et de la Russie (plus de 120 morts et 180 000 personnes déplacées au cours des deux dernières semaines). Cependant, jusqu’à présent, l’activité diplomatique n’a eu aucun impact réel sur les mouvements offensifs de l’armée syrienne, qui sont toujours en cours.
• L’événement principal de la semaine dans l’arène irakienne a été un attentat suicide dans un marché ouvert d’un quartier chiite de Bagdad. L’attaque était inhabituelle car la plupart des attaques menées jusqu’à présent par l’Etat islamique en Irak étaient “ordinaires” (pose d’engins piégés, fusillades, exécutions, etc.). Cela pourrait également indiquer l’intention de l’Etat islamique de mener des attaques de démonstration massives également en Irak, en mettant l’accent sur les attaques contre des membres de la communauté chiite.
• L’activité habituelle des différentes provinces et régions de l’Etat islamique a continué : en Libye, l’Etat islamique a pris le contrôle d’un village du Sud du pays pendant une courte période, tuant des personnes affiliées à l’armée de Haftar (qui se concentre sur la campagne à mener sur Tripoli dans le Nord de la Libye). Au Nigeria, l’Etat islamique a attaqué un camp de l’armée nigériane dans l’Etat de Borno (11 morts parmi les soldats nigérians, selon l’organisation) ; en Afrique centrale (près de la frontière entre l’Ouganda et le Congo), des membres de l’Etat islamique ont poursuivi leurs attaques contre l’armée congolaise ; en Somalie, un juge de haut rang a été assassiné dans la ville de Bosaso, sur les rives du golfe d’Aden, qui sert de centre de coordination aux activités de l’Etat islamique. En Inde, des membres de l’Etat islamique ont attaqué des soldats indiens dans la province du Cachemire et ont annoncé la création de la Province de l’Inde (un nom paru pour la première fois). En Afghanistan, les attaques contre l’armée afghane et l’appareil de sécurité du gouvernement afghan se sont poursuivies

Principaux événements en Syrie

La région d’Idlib

Attaque de l’armée syrienne par la Syrie dans la région d’Idlib (exact au 14 mai 2019)

Cette semaine, l’armée syrienne a poursuivi son attaque terrestre contre les organisations rebelles dans la région d’Idlib, qui a débuté début Mai 2019. Au cours de la phase initiale, les mouvements de l’armée syrienne se sont concentrés sur la partie Sud-Ouest de la région d’Idlib, où elle s’est emparée de plusieurs villes et villages situés au Nord-Ouest de Hama. Par la suite, l’armée syrienne a exercé des pressions sur les organisations rebelles sur la route reliant Lattaquié à la ville de Jisr al-Shughur, dans la partie Nord-Ouest de la région d’Idlib. L’attaque terrestre de l’armée était accompagnée d’un appui aérien syrien et russe. En convoquant le Conseil de sécurité des Nations Unies (10 mai 2019), le ministre des Affaires étrangères turc a demandé à son homologue russe de mettre fin à l’attaque. Les frappes aériennes et les manifestations des pays de l’Europe de l’Ouest n’ont pas empêché l’attaque jusqu’à présent.

• L’armée syrienne s’est principalement concentrée sur les villes et les villages situés le long de la route 56 menant de Hama à la plaine d’Al-Ghab (la route traverse la plaine d’Al-Ghab et atteint la ville de Jisr al-Shughur contrôlée par les rebelles). Selon nous, le mouvement syrien visait à prendre le contrôle de la partie Sud-Ouest de la région d’Idlib, sapant ainsi le contrôle des organisations jihadistes sur toute la région d’Idlib.
• Au cours des premiers jours de l’attaque (du 6 au 10 mai 2019), l’armée syrienne s’est emparée de plusieurs villes et villages situés au Nord-Ouest de Hama, à la périphérie Est de la plaine d’Al-Ghab (voir la carte). L’armée attachait une importance particulière au village de Kafr Nabudah, à l’Est de la plaine d’Al-Ghab, qui a été envahi par un soutien aérien russe. Ce village est perçu comme la “porte” de la région contrôlée par les rebelles et comme un secteur clé de la défense d’Idlib (Enab Baladi, 8 mai 2019; Al-Quds Al-Araby, 9 mai 2019). Une contre-attaque du Siège de Libération d’Al-Sham, qui défendait le village, a été contrecarrée par l’armée syrienne (Syria News, 10 mai 2019).

Frappes aériennes de la Russie et de la Syrie

• Des avions de combat russes et syriens ont lancé des frappes aériennes intensives contre des cibles dans la région d’Idlib, notamment pour apporter un soutien aérien à l’attaque terrestre de l’armée syrienne. Ainsi, par exemple :
  • Le Siège de Libération d’Al-Sham a signalé que des avions de combat russes avaient attaqué la banlieue de Kafr Nabudah, à 30 km au Nord-Ouest de Hama (Ibaa, 10 mai 2019).
  • Le 10 mai 2019, le Siège de Libération d’Al-Sham a annoncé que des hélicoptères de l’armée syrienne avaient attaqué le village de Maarat Harma, à 47 km au Nord de Hama, avec des barils de bombe (Ibaa, 10 mai 2019).

Réponse des organisations jihadistes

Afin de mettre un terme à l’attaque de l’armée syrienne, les organisations rebelles opérant dans la région d’Idlib ont mis en place une salle d’opération commune appelée “Fateh Dimashq” (“victoire” ou “conquête de Damas”). Cette salle des opérations comprend 26 organisations opérant dans la région d’Idlib, dirigées par le siège de la libération d’Al-Sham^[1]. Sur le terrain, la réponse à l’attaque syrienne comprenait principalement des tirs d’artillerie et de roquettes sur les forces de l’armée syrienne dans la région méridionale d’Idlib. En outre, les organisations rebelles ont envoyé des renforts dans les zones attaquées par l’armée syrienne dans le Sud-Ouest d’Idlib et ont tenté de mener des contre-attaques locales, la plupart du temps sans succès. Une manifestation a eu lieu dans la ville d’Idlib, au cours de laquelle les manifestants ont appelé à renverser le régime syrien (Khotwa, 10 mai 2019).

• Les points saillants de l’activité des rebelles sont les suivants :
  • Le Siège de Libération d’Al-Sham a annoncé que des roquettes Grad avaient été lancées contre les forces de l’armée syrienne au Nord-Ouest de Hama (Ibaa, 10 mai 2019).
  • Le Siège de Libération d’Al-Sham a annoncé qu’il avait tiré des armes lourdes contre des positions de l’armée syrienne dans les villages de Kafr Nabudah et Al-Mughayir, au Nord-Ouest de Hama (Ibaa, 11 mai 2019).
  • Le 8 mai 2019, une force du Parti islamique du Turkestan (Ouïghours de Chine) a attaqué les positions de l’armée syrienne dans le centre de la plaine d’Al-Ghab, à 57 km au Nord-Ouest de Hama. L’armée syrienne a tué des dizaines de membres qui ont participé à l’attaque (Spoutnik, 8 mai 2019; Butulat Al-Jaysh Al-Suri, 9 mai 2019).
  • Le commandant du centre de coordination russe en Syrie a annoncé que le 8 mai 2019, 12 roquettes avaient été lancées sur la base aérienne de Hmeymim. Il a noté que, grâce au système de défense aérienne de la base aérienne, toutes les roquettes avaient été interceptées. Selon lui, il n’y a pas eu de victimes ni de dégâts (TASS, 8 mai 2019).
  • Le 13 mai 2019, le Siège de Libération d’Al-Sham a tiré des roquettes de fabrication artisanale sur les positions de l’armée syrienne à environ 30 km au Nord-Ouest de Hama.

Initiatives diplomatiques

• Le 10 mai 2019, le Conseil de sécurité des Nations Unies s’est réuni pour discuter de la situation à Idlib. Lors de la session, la Russie a empêché le Conseil de sécurité de faire une déclaration publique, affirmant que le texte de la déclaration décrivait mal la situation à Idlib (Agence de presse TASS, 10 mai 2019). Les États-Unis, la Grande-Bretagne, la France et huit autres pays ont publié leur propre déclaration dans laquelle ils se déclaraient préoccupés par une catastrophe humanitaire à Idlib causée par des attaques dans la région. La déclaration appelle toutes les parties concernées à protéger les civils de la région et à se conformer à l’accord de cessez-le-feu conclu entre la Russie, la Turquie et l’Iran en septembre 2018 (AP, 11 mai 2019) ^[2].
• En outre, la Turquie et les pays d’Europe occidentale ont mené une action politique visant à mettre un terme à l’offensive de l’armée syrienne et à prévenir les pertes civiles :
  • L’agence de presse turque a rapporté le 9 mai 2019 (à la veille de la réunion du Conseil de sécurité) que le ministre turc des Affaires étrangères, Balut Chibushalo, avait demandé à son homologue russe que la Russie stoppe les frappes aériennes qui auraient tué plus de 100 civils au cours des deux dernières semaines (Agence de presse Anatolie, 10 mai 2019).
  • Le 13 mai 2019, les gouvernements britannique, allemand et français ont publié une déclaration commune dans laquelle ils ont déclaré que «cette escalade militaire doit cesser». La déclaration condamne également les attaques dirigées contre la population civile par le régime syrien et la Russie. Selon la déclaration, plus de 120 civils ont été tués au cours des dernières semaines à la suite de frappes aériennes et de bombardements aveugles de centres de population et d’infrastructures humanitaires (écoles, centres médicaux). Selon la déclaration, au cours des deux dernières semaines, il y a eu plus de 180 000 nouveaux déplacés. La déclaration se termine par un appel à toutes les parties concernées pour «éviter toute offensive militaire dans la région», afin de maintenir le cessez-le-feu et d’assurer la protection des civils (www.gov.uk, 13 mai 2019).
  • Le 13 mai 2019, le Président turc Erdoğan a eu une conversation téléphonique avec le Président russe Poutine sur les développements à Idlib. Erdoğan a exprimé sa préoccupation devant les violations du cessez-le-feu par le régime d’Assad dans la région d’Idlib et a protesté contre les attaques contre des civils et des hôpitaux. Selon lui, le régime Assad s’emploie à saboter la coopération turco-russe sur la question d’Idlib, à saper l’accord de Sotchi et à torpiller les processus politiques en Syrie (Anatolie, 14 mai 2019).
  • Le 14 mai 2019, une conversation téléphonique a eu lieu entre les ministres de la Défense turque et syrien, qui ont discuté des mesures à prendre pour réduire la tension à Idlib, dans le cadre de l’accord de Sotchi (Anatolie, 14 mai 2019).

Poursuite des actions offensives de l’armée syrienne

• Malgré les efforts politiques déployés par la Turquie et les pays d’Europe occidentale pour faire cesser les combats, les opérations offensives de l’armée syrienne dans la région méridionale d’Idlib se sont poursuivies. Le 13 mai 2019, l’armée syrienne a annoncé que ses forces avaient continué d’avancer dans la zone rurale au Nord-Ouest de Hama. Selon cette annonce, l’armée syrienne a repris plusieurs sites à environ 40 km au Nord-Ouest de Hama, notamment les villages de Sheikh Idris, Al-Toubah et Tal Hawash (Enab Baladi, 13 mai 2019). Les organisations rebelles ont déclaré avoir réussi à reprendre le village de Sheikh Idris, situé à un carrefour important (Khotwa, 13 mai 2019). Des avions de combat (peut-être syriens) ont continué à larguer des tonneaux sur la région d’Idlib (Khotwa, 13 mai 2019).

    
Droite : Un missile antichar tiré par le Front de libération nationale contre une fourgonnette des forces soutenant l’armée syrienne dans le village de Sheikh Idris ( Chaîne Youtube du Front de libération nationale, 13 mai 2019). Gauche : Le fourgon touché (Chaîne Youtube du Front de libération nationale, 13 mai 2019)

• Le 12 mai 2019, il a été signalé que des hélicoptères de l’armée syrienne avaient largué des tonneaux sur la zone de Kabanah, à 13 km au Sud-Ouest de Jisr al-Shughur (dans la partie Nord-Ouest de la région d’Idlib, contrôlée par les organisations jihadistes). Il a été rapporté que l’armée syrienne et les forces qui la soutenaient avaient commencé à tirer de l’artillerie sur les positions des organisations rebelles dans la région dans le but de progresser vers les forces rebelles (Syria TV, 12 mai 2019). Le Parti islamique du Turkestan a annoncé le 13 mai 2019 que les membres de l’organisation avaient freiné l’avancée de l’armée syrienne sur la route de Kabanah pendant trois jours consécutifs (Annonce du Parti islamique du Turkestan, Telegram, 13 mai 2019).

• Le 14 mai 2019, des avions de combat ont attaqué un marché et une école à Jisr al-Shugh. Selon une version, il s’agissait d’avions de combat syriens; selon une autre version – des avions de combat russes. Cinq civils auraient été tués lors de la frappe aérienne et plus de 10 autres auraient été blessés (Orient News, 14 mai 2019; compte Twitter d’Idlib Plus @ IdlibPlus, 14 mai 2019).

Résumé des victimes aux combats (exact au 14 mai 2019)

• Le 14 mai 2019, l’Observatoire syrien des droits de l’homme a signalé qu’au moins 364 personnes ont été tuées au cours des deux premières semaines écoulées depuis le début de l’escalade dans la région d’Idlib. Au moins 132 des personnes décédées appartenaient aux forces rebelles, 110 à l’armée syrienne et aux forces qui la soutenaient, et 122 étaient des civils (Observatoire syrien des droits de l’homme, 14 mai 2019).

Syrie orientale

• L’Etat islamique continue de mener une intense activité de guérilla contre les forces des FDS dans la région d’Al-Mayadeen-Deir ez-Zor, principalement sur la rive Est de l’Euphrate. Les principales attaques perpétrées au cours de la semaine écoulée (voir la carte) sont les suivantes :
  • Le 7 mai 2019, une moto piégée a explosé près d’un véhicule des FDS dans le village de Kashkiya, à environ 30 km au Sud d’Al-Mayadeen. Un combattant des FDS a été tué et trois autres blessés (Site Internet de partage de fichiers Pastethis.to, 8 mai 2019).
  • Le 8 mai 2019, l’Etat islamique a capturé deux combattants des FDS dans le village de Jadid Baqarah, à 24 km au Nord d’Al-Mayadeen. Les deux hommes ont été exécutés dans le village d’Al-Basira, à 14 km au Nord d’Al-Mayadeen (Site Internet de partage de fichiers de Pastethis.to, 8 mai 2019).
  • Le 9 mai 2019, des tirs ont visé un véhicule des FDS sur la route Dhiban-Al-Tiyana, au Sud-Est d’Al-Mayadeen. Plusieurs combattants des FDS ont été tués et blessés (Deir ez-Zor 24, 9 mai 2019).
  • Le 10 mai 2019, un engin piégé a été activé contre un poste de contrôle des FDS dans le village d’Al-Jardhy, à environ 19 km au Sud-Est d’Al-Mayadeen. Un des combattants des FDS a été tué et deux autres ont été blessés (Deir ez-Zor 24, 10 mai 2019).
  • Le 10 mai 2019, des membres de l’Etat islamique ont attaqué une position de l’armée syrienne et des forces qui la soutenaient dans la région d’Ayn Ali, sur la rive Ouest de l’Euphrate, à environ 10 km au Sud-Est d’Al-Mayadeen (Deir ez-Zor, 24 mai 2019).
  • Le 11 mai 2019, une moto piégée a explosé dans le village d’Al-Sour, à environ 50 km au Nord-Est de Deir ez-Zor. Deux combattants des FDS ont été blessés (Deir ez-Zor 24, 11 mai 2019).

• Le 14 mai 2019, des membres de l’Etat islamique ont tiré sur un véhicule des FDS dans la région d’Al-Basira, à environ 30 km au Sud-Est de Deir ez-Zor, tuant trois combattants qui se trouvaient à bord du véhicule. Le 13 mai 2019, des membres de l’Etat islamique ont tiré sur un poste de contrôle des FDS dans la région d’Al-Basira et ont blessé deux combattants (Shabakat Shumukh, 14 mai 2019).

Nord et Nord-Est de la Syrie

• Cette semaine, l’Etat islamique a mené des attaques terroristes dans la haute vallée de l’Euphrate :
  • Le 8 mai 2019, un combattant des FDS a été tué par balle à Tabqa, à l’Ouest d’Al-Raqqah. Le combattant a été blessé (Site Internet de partage de fichiers Pastethis.to, 8 mai 2019).
  • Le 8 mai 2019, un engin piégé a explosé contre un véhicule des FDS dans le village d’Alhus, à environ 40 km à l’Est d’Al-Raqqah. Deux combattants ont été blessés et le véhicule endommagé (Site Internet de partage de fichiers Pastethis.to, 8 mai 2019).
  • Le 10 mai 2019, un combattant des FDS a été abattu alors qu’il conduisait une moto dans la région d’Al-Shaddadi (à environ 47 km au Sud d’Al-Hasakah). L’incident a été filmé par l’Etat islamique (Télégramme, 11 mai 2019).

Principaux développements en Irak

Activités de terrorisme et de guérilla de l’Etat islamique

• Le principal attentat de l’Etat islamique cette semaine a été un attentat suicide sur le marché libre Al-Jamila à Madinat Al-Sadr, le quartier chiite dans l’Est de Bagdad (Al-Sumaria, 9 mai 2019). L’agence Amaq de l’Etat islamique a publié un message affirmant que l’organisation était responsable de l’attaque. Selon la revendication de responsabilité, un membre de l’Etat islamique s’est fait exploser avec une ceinture d’explosifs, tuant huit chiites et en blessant dix autres (Shabakat Shumukh, 11 mai 2019). Note: Un officier supérieur de la police irakienne a déclaré à Reuters que le rapport sur le terroriste n’était pas vrai. Selon lui, il s’agissait d’une détonation contrôlée d’un objet suspect (Reuters, 10 mai 2019). Selon l’évaluation de l’ITIC, il s’agissait bien d’un attentat suicide à la bombe, car on sait qu’un incendie s’est déclaré et que des ambulances sont arrivées sur le site.

    
Droite : La scène de l’attentat suicide (www.iraqnews-in.com, 10 mai 2019). Gauche : Ambulances arrivant sur les lieux après l’attaque (Akhbar Shams al-Haqiqa, 9 mai 2019)

Au cours des derniers mois, la plupart des attaques menées dans l’ensemble de l’Irak étaient des attaques «ordinaires» (poses d’engins piégés, attaques à la mitrailleuse, exécutions, etc.). Le dernier attentat suicide à Bagdad a eu lieu il y a environ un an, dans l’un des quartiers chiites, un terroriste s’était fait exploser, faisant quatre morts et 15 blessés (Al-Jazeera, 24 mai 2018). L’attentat-suicide sur le marché libre de Bagdad, à supposer qu’il se soit produit, est donc inhabituel et peut indiquer un effort de l’Etat islamique pour mener des attaques mettant en cause de nombreuses personnes, principalement à l’encontre des chiites.

• Au même moment, les attaques habituelles de l’Etat islamique se poursuivaient dans les différentes provinces :
  • Province de Salah al-Din : Des membres de l’Etat islamique ont tiré des tirs de mitraillettes sur un véhicule de l’armée irakienne à l’Est de Samarra, tuant et blessant plusieurs soldats (Akhbar al-Muslimeen, 11 mai 2019).
  • Province de Diyala : Des tireurs d’élite ont tiré sur un poste de l’armée irakienne à environ 40 km au Sud-Est de Baqubah, tuant un soldat et en blessant un autre (Akhbar al-Muslimeen, 1^er mai 2019).
  • Province de Salah al-Din : La Mobilisation populaire a annoncé qu’elle avait localisé des dizaines d’engins piégés de l’Etat islamique au Sud de Samarra (Al-Sumaria, 9 mai 2019).
  • Province de Salah al-Din : L’agence Amaq de l’Etat islamique a annoncé que les membres de l’organisation avaient fait exploser un engin piégé contre une position de la Mobilisation populaire au Sud de Shirqat, qui a tué un combattant de la Mobilisation populaire, en a blessé deux autres et a frappé l’équipement militaire de la milice (Telegram, 9 mai 2019).
  • Province de Diyala : Des membres de l’Etat islamique ont fait exploser un engin piégé contre un véhicule de l’armée irakienne dans la région de Khanaqin, blessant des soldats qui se trouvaient à bord du véhicule (Shabakat Shumukh, 14 mai 2019).

Activités de contre-terrorisme des forces de sécurité irakiennes

• Le ministère irakien de la Défense a annoncé que plusieurs membres de l’Etat islamique avaient été tués dans le cadre de l’opération visant à nettoyer Al-Jazeera (la zone désertique du Nord-Ouest de l’Irak). En outre, plusieurs véhicules et maisons d’hôtes du groupe État islamique dans le désert ont été détruits (Ministère irakien de la Défense, 8 mai 2019).

    
Droite : Véhicule de l’Etat islamique saisi lors de l’opération. Gauche : Abri souterrain de l’Etat islamique localisé pendant l’opération (Ministère irakien de la Défense, 8 mai 2019)

• Activités supplémentaires :
  • Province de Ninive : A Mossoul, les services de renseignements militaires irakiens ont arrêté un agent de l’Etat islamique chargé de fabriquer des voitures piégées dans la province de Ninive. Il aurait participé à la mise en place de cellules dormantes de l’organisation (Al-Sumaria, 14 mai 2019). Le nom du détenu n’a pas été révélé.
  • Province d’Al-Anbar : Les forces de sécurité irakiennes ont désactivé cinq engins piégés prêts à être utilisés à l’Ouest de la ville de Hit, à environ 90 km à l’Ouest de Ramadi (Al-Sumaria, 13 mai 2019).
  • Province de Salah al-Din : La milice Saraya al-Islam, dirigée par le religieux chiite Muqtada al-Sadr, a annoncé qu’elle avait localisé et détruit quatre hôtels de l’Etat islamique au nord de la ville de Samarra (Al-Sumaria, 13 mai 2019).

La péninsule du Sinaï et l’Egypte

• Le 11 mai 2019, la province du Sinaï de l’Etat islamique a annoncé que ses membres avaient fait exploser un engin piégé contre un tank de l’armée égyptienne à l’Est d’Al-Arish. Le char a été mis hors service (Telegram, 11 mai 2019). Selon des sources locales, un char endommagé en train d’être remorqué aurait été repéré dans la région (Compte Twitter @ShahidSinai, 11 mai 2019).
• L’agence Amaq de l’Etat islamique a annoncé que ses membres avaient tué un agent de l’armée égyptienne à Al-Arish (Shabakat Shumukh, 14 mai 2019).

Activités de l’Etat islamique dans le monde entier

Libye

• Selon une annonce de l’agence Amaq de l’Etat islamique, des membres de la province de Libye ont pris le contrôle de la ville de Ghadwa, située dans le Sud de la Libye (à environ 65 km au Sud-Ouest de la ville de Sabha). Selon l’annonce, les membres de l’organisation ont attaqué un certain nombre de postes de commandement de l’armée de Haftar dans la ville, les ont incendiés et ont tué des hommes recherchés, dont deux commandants de l’armée de Haftar. Ils ont également incendié des maisons et des voitures appartenant à des commandants et à des partisans de l’armée de Haftar. Les assaillants ont incendié le bâtiment du conseil municipal et le bâtiment du «conseil militaire» appartenant aux partisans de Haftar (Akhbar al-Muslimeen, 9 mai 2019).

     
Attaque de l’Etat islamique dans la ville de Ghadwa (Telegram, le 10 mai 2019)

   
Droite : Des miliciens locaux effectuant des recherches à Ghadwa après le retrait des membres de l’Etat islamique. Gauche : Une des voitures incendiées (Libye al-Ahrar, 9 mai 2019)

Début Mai 2019, des membres de l’Etat islamique ont attaqué un poste de commandement militaire dans la ville de Sabha, près de la ville de Ghadwa, et l’ont repris pendant plusieurs heures. Selon nous, leur activité témoigne de l’établissement de l’organisation dans le Sud de la Libye, où elle exploite la faiblesse des forces de Haftar, engagées dans leur activité dans le Nord du pays.

Inde

• Le 10 mai 2019, l’Etat islamique a publié une déclaration sous le nom de «Province de l’Inde», revendiquant le meurtre et les blessures de plusieurs soldats indiens dans une ville du district de Shopian au Cachemire. Selon la revendication de responsabilité, des membres de la province de l’Inde auraient échangé des coups de feu avec l’armée indienne (Telegram, 10 mai 2019; un rapport identique a également été publié par l’Agence de presse Amaq sur le site Akhbar al-Muslimeen, 10 mai 2019). Selon Reuters, l’un des hommes armés qui a été tué était affilié à l’Etat islamique. Selon une déclaration de la police indienne, le défunt aurait été identifié comme étant Ishfaq Ahmad Sofi. Une source de l’armée indienne a confirmé qu’au cours de la dernière décennie, Sofi avait été actif dans un certain nombre d’organisations militantes au Cachemire et était affilié à l’Etat islamique (Reuters, 11 mai 2019).

C’est la première fois que le terme «province de l’Inde» apparaît dans les annonces de l’Etat islamique. Cela peut indiquer que l’Etat islamique essaie d’étendre ses activités au Cachemire et peut-être ailleurs en Inde. Récemment, il y a eu une prolifération d’annonces provenant de nouvelles provinces et de nouvelles régions de l’Etat islamique telles que la province de Somalie, la province d’Afrique centrale et (les régions de) la Tunisie et le Sri Lanka. À ce stade, il est difficile de savoir si les annonces des nouvelles provinces indiquent effectivement l’existence d’une infrastructure importante, mais on peut supposer que l’organisation s’efforcera d’y démontrer de l’activité. Les annonces de l’Etat islamique sur les nouvelles provinces et régions ont pour objectif de faire passer le message suivant : même après le choc subi par l’Etat islamique en Syrie, l’organisation continue de fonctionner à travers le monde et étend même ses activités.

Afrique de l’Ouest

Nigéria

• Le 10 mai 2019, des membres de la province de l’Afrique de l’Ouest ont attaqué un camp de l’armée nigériane dans l’État de Borno, dans le Nord-Est du Nigéria. Les membres ont pris d’assaut le camp à moto et ont tiré sur des soldats de l’armée nigériane (Reuters, 11 mai 2019). L’agence Amaq de l’Etat islamique a publié une déclaration de responsabilité. Selon la revendication de responsabilité, les assaillants ont tué 11 soldats, détruit deux chars, et saisi des armes et du matériel militaire. À la fin de l’attaque, les membres de l’Etat islamique ont incendié le camp (Shabakat Shumukh, 12 mai 2019).

Afrique centrale

• La province d’Afrique centrale de l’Etat islamique a revendiqué la responsabilité d’une attaque contre un poste de l’armée congolaise dans la ville de Bundibugyo, située en Ouganda (environ 10 km à l’Est de la frontière ougandaise-congolaise). Un certain nombre de soldats de l’armée congolaise ont été blessés et d’autres ont réussi à s’enfuir (Telegram, 8 mai 2019). C’est la troisième attaque dans la région frontalière entre le Congo et l’Ouganda que la Province d’Afrique centrale de l’Etat islamique revendique au cours des trois dernières semaines (thedefensepost.com, 9 mai 2019).

Somalie

• Selon une annonce de la province somalienne de l’Etat islamique, le 11 mai 2019, les membres de l’organisation ont tenté d’assassiner un juge de haut rang dans la ville de Bosaso, sur les rives du golfe d’Aden dans l’Est du pays (Telegram, 12 mai 2019). L’agence Amaq de l’Etat islamique a déclaré qu’il s’agissait d’une tentative de tuer le président du tribunal de district de Bosaso en faisant exploser un engin piégé contre sa voiture. Cependant, il n’était pas sur les lieux au moment des faits. Huit gardes de sécurité et assistants du juge ont été blessés, dont un autre juge et le responsable de la sécurité du tribunal (Telegram, 12 mai 2019). Des sources locales en Somalie ont confirmé le rapport (Al-Somal al-Youm, 11 mai 2019). La ville de Bosaso, dans le Nord-Est de la Somalie, est récemment devenue le site d’activité intense de l’Etat islamique.

Afghanistan

• L’agence de presse Amaq a annoncé que le 13 mai, ses membres avaient tué un officier de l’appareil de sécurité afghan dans la ville de Nangarhar. Le même jour, des membres de l’Etat islamique ont fait exploser un engin piégé près d’un véhicule militaire dans la ville de Jalalabad, blessant les soldats à bord du véhicule (Shabakat Shumukh, 14 mai 2019).

^[1] La plupart des organisations participant à la salle des opérations sont de nature jihadiste, le Siège de Libération d'Al-Sham étant dominant. Les autres participants sont Jaysh alIzza («Armée de la gloire»), le Parti islamique du Turkestan (Ouïghours de Chine) et Ajnad al Qawqaz («Armées du Caucase»). ↑
^[2] Le 17 septembre 2018, le Président russe Vladimir Poutine et le Président turc Recep Tayyip Erdoğan se sont rencontrés dans la ville de Sochi (Russie). Poutine a déclaré que les deux parties avaient décidé de créer une zone démilitarisée d'une largeur de 15 à 20 km le long de la ligne de contact entre les forces du régime syrien et les forces de l'opposition, qui serait mise en place le 15 octobre 2018. Il a été convenu que cela s'accompagnerait du retrait des «forces armées extrémistes» de la zone démilitarisée. L’Iran a pris part aux discussions politiques qui ont abouti à l’accord de Sochi, mais en raison de désaccords, il n’a pas adhéré à la déclaration russo-turque. Cependant, l'accord de Sotchi n'a pas été mis en œuvre sur le terrain. ↑

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